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Tristan Tzara 1896 - 1963

Tristan Tzara, pseudonyme de Samuel Rosenstock, est né en 1896 en Roumanie. Il écrit dès son adolescence. En 1915, il quitte la Roumanie et s'installe à Zurich où, avec Hugo Ball, il fonde le Cabaret Voltaire qui édite une revue, Dada, à partir de juillet 1917. Jusqu'en 1921 il écrit plusieurs manifestes pour la scène (publiés en 1924 sous le titre Sept manifestes Dada), contre la guerre mais aussi contre la littérature et l'art tels qu'ils sont produits. Ses poèmes et ses sketches sont vite connus à Paris où il vient en 1920, accueilli notamment par André Breton et Picabia. Sa poésie cherche avec les mots ce qu'ont fait des peintres comme Matisse et Picasso, loin des projets de Breton et des futurs surréalistes : il s'en sépare dès 1921.

En 1931, il retrouve pour un temps les surréalistes par son rapprochement avec le Parti communiste. Il y adhère, mais rejette l'idée d'une poésie au service d'un idéal révolutionnaire. Organisateur pendant l'Occupation du Comité national des écrivains dans le Sud-ouest, il quitte le Parti communiste en 1956, quand les Soviétiques envahissent la Hongrie. Il meurt à Paris en 1963.

Passionné notamment par les anagrammes, il a conduit des recherches érudites sur les oeuvres de Villon et de Rabelais. Il a également écrit de nombreuses études sur la poésie (Corbière, Apollinaire, Éluard, Nazim Hikmet, Reverdy, etc.) et l'art contemporain (Arp, Klee, Ernst, Picasso, etc.). Son oeuvre reste peu connue, malgré l'édition en 5 volumes préparée par Henri Béhar (Flammarion, 1975-1981).

Pour faire un poème dadaïste

Pour faire un poème dadaïste
Prenez un journal
Prenez des ciseaux
Choisissez dans ce journal un article ayant la longueur que vous comptez donner à votre poème.
Découpez l'article.
Découpez ensuite avec soin chacun des mots qui forment cet article et mettez-les dans un sac.
Agitez doucement.
Sortez ensuite chaque coupure l'une après l'autre dans l'ordre où elles ont quitté le sac.
Copiez consciencieusement.
Le poème vous ressemblera.
Et vous voici un écrivain infiniment original et d'une sensibilité charmante, encore qu'incomprise du vulgaire.

Tristan Tzara
Extrait de Poésie, Musik, Etc... du 1er février 2013

Cinquantenaire de la mort de Tristan Tzara

Hier, dans une regrettable indifférence, c'était le cinquantenaire de la mort de Tristan Tzara (16 avril 1896-25 décembre 1963), cofondateur du mouvement Dada. Ce n'est en cette qualité que son nom a acquis un statut d' icône. Son oeuvre reste toutefois superbement ignorée (si ce n'est dans les milieux académiques, et encore). Paul Neuhuys (16 septembre 1897-16 septembre 1984) fut le premier critique en Belgique francophone à souligner l'importance de Tzara et de Dada. [...]

Ca ira - 26 décembre 2013
Marcel Janco - Portrait de Tzara - 1919

Tristan Tzara en 1922

Tzara, dada

Tristan Tzara est décédé en décembre 1963. Un mois auparavant, il accordait à Madeleine Chapsal, alors jeune journaliste à l'Express, une interview à l'occasion de la réédition des Manifestes dada.

La pierre et le sel du 12/04/2012


Biographie : qui est Tristan Tzara ?

Par Marie-Paule Berranger dans La République des Lettres

Tristan Tzara, pseudonyme de Samuel Rosenstock, est né le 16 avril 1896 à Moinesti (Roumanie).

Au sortir du lycée, il y fonde une première revue avec Ion Vinea et Marcel Janco, Le Symbole. Renonçant en 1915 à ses études de mathématiques et de philosophie, il quitte son pays pour Zurich, où il retrouve pacifistes et révolutionnaires de toute l'Europe.

Aux côtés de Hugo Ball, Tristan Tzara crée en 1916 le Cabaret Voltaire, auquel succède bientôt la revue Dada. L'invention du mot Dada, choisi parce qu'il "ne signifie rien", cristallise le nihilisme ambiant et attire entre autres Hans Arp, Richard Huelsenbeck, Marcel Janco, et en 1918 Francis Picabia, dont la revue 391 permet à Tzara de mesurer l'importance potentielle de ce qui n'aurait pu être qu'un canular, ou l'expression du désarroi produit par la guerre : Dada correspond bien à un état d'esprit international et cette constatation lui permet de surmonter momentanément les tensions entre dadaïstes "purs" et artistes révolutionnaires, allemands pour la plupart, soucieux d'efficacité idéologique.


Le Mouvement dada : Entretien radio avec Tzara le 7 février 1953


Tristan Tzara par Man Ray

Tristan Tzara (1896-1963)

Vidéo YouTube sans paroles et sans légendes, hélas ! sur sa vie avec Dada. Une très grande collection de photos.

Musique : Henri Sauguet (1901-1989), Piano Concerto n° 1.



Tristan Tzara - Dada Into Surrealism (1959)

Vidéo YouTube où Tzara répond en français à des questions en anglais sur l'évolution du mouvement dada.


En juin 1917 Tzara fit paraître le 1er numéro de Dada "recueil littéraire et artistique" à Zurich.

Dada n° 1 - juillet 1917 - le périodique de Tzara lisible en ligne

Dada n° 2 - décembre 1917

Dada n° 3 - décembre 1917

"Manifestation Dada" dans Dada n° 7 Dadaphone - mars 1920

Tristan Tzara

Tzara jeune

Le nom de Tzara se confond souvent avec Dada, cette nébuleuse d'activistes et de comploteurs surgie au milieu des décombres de la Première Guerre mondiale. Il est l'homme au monocle, le dandy sans foi ni loi, un « barbare auto stylé » pour reprendre l'expression de l'un de ses amis. Propagandiste infatigable, il incarne Dada, il en est le porte-voix.

Le jeune homme énigmatique est né en 1896 à Moinesti, au milieu des Carpates sous le nom de Samuel Rosenstock. Après des études à Bucarest où il s'ennuie, il file à Zurich en 1915. L'Europe est en flammes et la Suisse est le carrefour de tous ceux qui refusent de mourir au pas cadencé. Dans les cafés et les dancings, on rêve de révolutions et on refait le monde. Le jeune roumain mélancolique, féru de littérature symboliste, est devenu un rebelle. Rien ne semble l'arrêter. Sa légende commence vraiment là, dans sa petite chambre d'hôtel d'où il inonde la planète avec ses brûlots et ses appels vengeurs dont le fameux Manifeste Dada. On peut y lire cette profession de foi : « Que chaque homme crie, il y a un grand travail destructif, négatif à accomplir. Balayer, nettoyer. »

En 1920, il débarque à Paris où il est accueilli comme le messie par quelques jeunes gens fascinés par le nihilisme Dada. Ils sont arrogants et talentueux. Ils s'appellent Aragon, Breton et Soupault. Véritable imprésario de lui-même, Tzara a balisé le terrain. Avec la caution d'Apollinaire, il multiplie les coups d'éclat, les scandales, tout en dynamitant le langage poétique. Dada est une ivresse collective et un emballement de la jeunesse avec bagarres, insultes et provocations en tous genres. C'est Breton qui siffle la fin de la récréation. Le sabotage en règle, c'est bien, mais il faut essayer de construire quelque chose. Ce sera le mouvement surréaliste. Tzara, lui, s'éloigne et choisit les frivolités du Paris des Années folles. Il épouse une femme riche et se fait construire un hôtel particulier avenue Junot. Sa poésie se fait lyrique, sombre, prophétique, sous influence rimbaldienne. Discrètement, il se réconcilie avec Breton et devient vite l'un des théoriciens du surréalisme à son apogée. Réagissant au péril totalitaire à la fin des années trente, il prône une morale de l'urgence. Il devient un militant antifasciste et soutient activement le combat des républicains espagnols.

Pendant l'Occupation, il rejoint la Résistance et se rapproche du Parti Communiste. Il s'en éloigne dès 1956, au moment de l'insurrection hongroise. Discret, il s'enferme souvent dans son appartement de la rue de Lille au milieu de ses livres et de ses fétiches africains. Il y meurt le 24 décembre 1963.

François Buot enseignant, écrivain
Docteur en sciences humaines

Hans Arp, Tristan Tzara et Max Ernst en 1921

Tristan Tzarathustra

Site dédié à Tzara


Tristan Tzara sur son dada

par Philippe Lançon dans Libération

Le loup dada de Roumanie est une bête sauvage et raffinée, à monocle et à mèche noire. Son regard est plein de dents et il avance cintré. A cheval sur l'apocalypse, c'est le 17 janvier 1920 qu'il migre en France. Quelques jours plus tard, il lit dans un théâtre parisien un texte de Léon Daudet, écrivain de droite extrême, symbole de la vieille culture à dynamiter. Aragon et Eluard agitent des sonnettes de manière à ce que le public n'entende rien. On n'a jamais vu ça.

Bientôt, des gens jetteront des escalopes sur la scène. «Il nous a montré ce qu'était le scandale», se souvient Philippe Soupault en 1971. Un poème du loup dada s'appelle Eau sauvage, il a peut-être inspiré Christian Dior : «Les dents affamées de l'oeil/ couvertes de suie de soie/ ouvertes à la pluie/ toute l'année/ l'eau nue/ obscurcit la sueur du front de la nuit/ l'oeil est enfermé dans un triangle.» On dirait du Picasso. Le loup a étudié les maths, la philosophie. Il est entré dans Paris.

Pendus. Il est féroce, bruyant, timide, mélancolique. Des mécènes l'aideront, jamais il ne sera riche. Il écrit pour agir, déjà pour exprimer Où boivent les loups, 1932, illustré par Max Ernst : «Ni vin ni usure n'ont su reposer/ sur le fond du tonneau la détresse ancienne/ mouvante faiblesse quel vent a-t-il su/ secouer le cadenas des sourcils à la longue/ les volets fermés aux visions anciennes/ l'attente sans mots nidifie dans les yeux.» Il faut voir, mordre, détruire, aérer, hurler. Comme disait l'autre, il faut changer la vie.

Né Samuel Rosenstock, fils d'une famille juive roumaine relativement aisée, Tristan Tzara a quitté son pays pour enfoncer le monde d'hier et ses vieux masques humanistes. Il se baptise Tristan, comme celui d'Isolde et comme Corbière, l'auteur des Amours jaunes, et Tzara, qui veut dire terre en roumain.

Ses premiers poèmes sentent le symbolisme, mais la violence apparaît. Il y a de l'eau, des épouvantails, des pendus : «Pan de mur fendu/ Me suis demandé/ Aujourd'hui pourquoi/ Ne s'est pas pendue/ Lia la très blonde/ Avec une corde...»

Rimbaud et Apollinaire deviennent et resteront ses phares. Sur la mort du second, il écrit : «Nous ne savons rien/ nous ne savions rien de la douleur/ la saison amère du froid [...] si les oiseaux étaient parmi nous pour se mirer/ dans le lac tranquille au-dessus de nos têtes/ ON POURRAIT COMPRENDRE/ la mort serait un beau long voyage/ et les vacances illimitées de la chair des structures et des os.» Il vit dans un monde où «il fait si noir que seules les paroles sont lumière». Animée par Dada, cette lumière se précise : «L'obscurité est productive si elle est lumière tellement blanche et pure que nos prochains en sont aveuglés.» Des flashs dans la gueule du lecteur endormi.

Après avoir cofondé, en 1916, le mouvement à Zürich, Tzara est venu en France, le pays des lettres, pour foutre le désordre dans les mots. Il a 20 ans, écoutez-le : «Regardez-moi bien ! Je suis idiot, je suis un farceur, je suis un fumiste. Regardez-moi bien ! Je suis laid, mon visage n'a pas d'expression, je suis petit. Je suis comme vous tous !» Premier texte publié dans Littérature, revue des futurs surréalistes.

Son rire secoue ceux qui l'entendent. Il nie les affirmations, positions, certitudes. Aragon s'en souvient en 1940 dans Aurélien : Tzara entre au salon, c'est «un drôle de petit homme, très gai, avec un monocle retenu par un large ruban noir et que la cravate rouge de Denis fait rire aux éclats. "Rouge ! - dit-il - Pourquoi rouge ? " Il roule formidablement l'R, et rit à gorge déployée. Ça doit, pour lui, avoir tout un sens qui échappe. Son rire est terriblement contagieux.»


Le Coeur à Gaz

La représentation chahutée du Coeur à gaz de Tzara, le 6 juillet 1923, consomme la rupture entre dadaïstes et surréalistes et marque la fin du groupe Dada parisien.


Le Dadaïsme

Tristan Tzara, le fondateur du mouvement ouvre, en 1916, un dictionnaire et pointe un mot au hasard : dada. Ainsi, l'origine du mot désignant ce mouvement est dû au hasard, le dadaïsme aurait pu s'appeler tout autrement. Le dadaïsme se caractérise par un renversement et une remise en cause et un rejet des conventions, de tout genre soit elles (politique, artistique, idéologique.) Ce mouvement rassemble les artistes qui ont refusé de partir faire la guerre, leur goût pour la provocation et le rejet des vieilles valeurs peut s'expliquer par ce contexte de guerre. Le mouvement dada finira par s'éteindre en 1925, la rupture entre dadaïsme et surréalisme est faite lors d'un procès et l'affrontement entre Tristan Tzara et André Breton.

Les principaux foyers du dadaïsme sont : Zurich (foyer de naissance du dadaïsme), New York, Berlin, Paris et Cologne. Entre temps, le mouvement se développe et les nombreux manifestes parviennent en France malgré la censure de la guerre.

Tristan Tzara, Sept manifestes dada, 1918

Tout produit du dégoût susceptible de devenir une négation de la famille, est dada ; protestation aux poings de tout son être en action destructive : DADA ; connaissance de tous les moyens rejetés jusqu'à présent par le sexe publique du compromis commode et de la politesse : DADA ; abolition de la logique, danse des impuissants de la création : DADA; de toute hiérarchie et équation sociale installée pour les valeurs par nos valets : DADA ; chaque objet, tous les objets, les sentiments et les obscurités, les apparitions et le choc précis des lignes parallèles, sont des moyens pour le combat : DADA ; abolition de la mémoire : DADA ; abolition de l'archéologie : DADA ; abolition des prophètes : DADA ; abolition du futur : DADA ; croyance absolue indiscutable dans chaque dieu produit immédiat de la spontanéité : DADA ; saut élégant et sans préjudice d'une harmonie à l'autre sphère; trajectoire d'une parole jetée comme un disque sonore cri; respecter toutes les individualités dans leur folie du moment : sérieuse, craintive, timide, ardente, vigoureuse, décidée, enthousiaste; peler son église du tout accessoire inutile et lourd; cracher comme une cascade lumineuse la pensé désobligeante ou amoureuse, ou la choyer — avec la vive satisfaction que c'est tout à fait égal — avec la même intensité dans le buisson, pur d'insectes pour le sang bien né, et doré de corps d'archanges, de son âme. Liberté : DADA DADA DADA, hurlement des douleurs crispées, entrelacement des contraires et de toutes les contradictions, des grotesques, des inconséquences : LA VIE.

Le texte est une énumération de ce que l'auteur veut faire passer pour la définition de « dada ». Chaque phrase alterne entre critique et revendications. Certaines énumérations décrivent les différents sentiments qui caractérisent la folie : « sérieuse, craintive, timide. » Tout est imagés, les définitions se suivent comme des vers, c'est de la prose poétique.

Tout d'abord, la graphie n'est pas la même tout le long du texte. On peut distinguer quatre graphies du mot « dada ». Le mot se distingue du reste du texte, il apparaît donc au lecteur dès le premier coup d'oeil. Le lien entre la graphie et le sens est important.

Puis, la syntaxe n'est pas classique ; le manifeste est formé en une seule phrase. Le seul point est situé à la fin de l'extrait. Les différentes idées de l'auteur sont séparées par des points virgules. Chaque point virgule est précédé du mot dada, qui est ainsi mis en valeur.

Grâce à la ponctuation, le rythme est rapide, les définitions sont enchaînées et nombreuses. Certains mots sont répétés (« abolition »). Il y a très peu de verbes et beaucoup d'accumulations. Le champ lexical de la violence est présent : « dégoût », « douleur », « cri »...

Ainsi, l'auteur revendique l'abolition de la logique, de la mémoire, des prophètes, du futur, de l'archéologie, des hiérarchies. Il veut faire prendre conscience aux gens du monde et dénoncer l'humain. Il est forcé de passer par la révolte verbale pour pouvoir être libre et penser, c'est le nihilisme (= point de vue philosophique d'après lequel, le monde et particulièrement l'existence humaine est dénué de toute signification, tout but, toute vérité, source : Wikipédia.)

Ce texte est, comme le veut le mouvement, dénué de logique, voire de sens, l'auteur provoque avec dérision. Il a pu donc susciter de nombreuses réactions.

C'est donc par cet esprit nihiliste, osé et surtout nouveau, que ce mouvement peut être classé dans le registre de la folie. Avant le dadaïsme, aucun mouvement n'avait à ce point rejeté la logique et les conventions avec cette violence, ce mouvement a dû donc choquer les gens et marquer les esprits.


La maison de Tzara à Montmartre (1926)